mercredi 17 octobre 2007

L'origine du réalisme

1839, Gustave Courbet arrive à Paris il a 20 ans. Il a un profil assyrien, parle mal et méprise l’orthographe du «bon français». Le jeune franc-comtois apprend sa technique de l’intérieur de la peinture, c'est-à-dire en copiant encore et encore les chefs d’œuvres des maîtres et crée son style qui fait scandale. Il casse tous les sujets sans jamais les théoriser.
Son œuvre passe par tous les genres et objets, il ya des scènes de chasse terribles, des natures mortes invraisemblables ainsi que des représentations de l’ordinaire : son atelier, une après-dînée à Ornans, un enterrement à Ornans... L’ordinaire est peint dans la simplicité, la froideur du réel et de manière démesurée.

Ainsi ses autoportraits ne comportent aucune psychologie. Il peint des nues sans le moindre prétexte, si bien que le spectateur observe l’origine du monde, le sommeil et les baigneuses avec un regard à la fois concupiscent et honteux. Il transforme le beau en sexuellement attirant et le spectateur en voyeur. Il réalise d’autre part des paysages somptueux, parfois faits au couteau de cuisine, qui attirent par le soulèvement de pigments et repoussent de par la densité de la matière. La dualité reste une constante dans sa peinture.

Cet être dévoré par son ego s’impose et se met à dos ses contemporains : George Sand le méprise, « c’est nul et c’est bête rien de plus », Victor Hugo l’ignore ; Delacroix reconnaît son talent d’artiste mais dénonce « la vulgarité et l’inutilité de la pensée» et Baudelaire, ancien ami, lui reproche d’être un « maniériste du laid ». Seuls Zola et Proudhon reconnaitront en lui un maître.

Dans ses œuvres où il peint l’allégorie du réel et recrée la nature, se dégage encore aujourd’hui un parfum de scandale. Une rétrospective sur Gustave Courbet se tient aux galeries nationales du grand palais du 10 octobre 2007 au 28 janvier 2008.

Sources : Télérama hors-série sur Courbet, lemonde.fr, lefigaro.fr

2 commentaires:

Christian BlinD a dit…

De la part de Pierre Joseph Proudhon, ca ne saurait m'étonner qu'il n'apprécie pas l'oeuvre de Delacroix... (un vrai Anarchiste comme lui)
A voir effectivement.

Etudiant a dit…

Quelques précisions qui me semblent utiles, malgré la véracité et la concision de ce bon article...

Courbet est le premier artiste à détourner de sa fonction le format dit "historique". Il peint des scènes populaires, en accentue les aspects misérables sur des toiles au format démesuré, réservé jusqu'alors aux scènes historiques ou mythologiques. ex : "L'Enterrement à Ornans" h/t de 7 m de long, représentant les funérailles populaires d'un anonyme d'une petite ville de Normandie à l'échelle 1.

Peint dès 1850, ce tableau est le point de départ de la réflexion de Courbet sur la relation entre l'Art et le Beau, qu'il ne cessera d'interroger tout au long de son oeuvre.

Courbet est donc, sans aucun doute, le premier peintre à introduire "le laid" dans l'Art. Remettant en cause les fondements de l'esthétique grecque antique, qui considère qu'"une oeuvre d'art est la belle représentation d'une belle chose", le jeune Gustave souvent critiqué et incompris de ses contemporains ouvre la voie à tout l'art du XXè siècle.

De Duchamp (qui interrogera la notion d'oeuvre d'art par sa "Fontaine" de 1917 et ses ready-made) à Soutine (et son "boeuf écorché", citation de Rembrandt, écoeurante par son aspect charnel mais magnifique par sa matière et sa composition), les artistes du XXè ont hérité de Courbet l'idée que ce qui fait une oeuvre d'art,ce n'est pas la beauté de l'objet qui y est représenté, mais bien la beauté de la représentation en elle-même! (les contrastes, la composition, les jeux des matières, de couleurs, de valeurs...)

On peut faire une toile splendide d'un sujet immonde ; voilà qui, en quelques mots, résume l'aspect visionnaire de l'oeuvre de Courbet.

Filez voir l'expo!

Armelle / Mamzelle Zel