Réponse au collectif "Les Artistes contre la tour Eiffel" :
Moi, Gustave Eiffel, je défends, devant bien des tribunes et depuis longtemps déjà, mon projet. Je tiens à dire qu’il est bien regrettable qu’il soit si critiqué alors même que sa construction débute. Vous, artistes, devriez le comprendre aisément : il est peu commun de critiquer les œuvres à l’état d’esquisses et de trouver le maître dans ses brouillons.
Mon projet est financé par l’Etat et a toute l’attention de celui-ci. Il a pour but d’être l’un des éléments centraux de la prochaine exposition universelle de 1889. Cette date, vous la connaissez tous, c’est celle du centenaire de notre révolution. A cette occasion, un édifice sera construit aussi solide que nous sont chères nos libertés et nos droits. L’Etat veut édifier au sein de Paris le symbole de sa modernité. Bientôt, nous entrerons dans le XXème siècle, et je vais y faire entrer Paris comme la capitale de ce nouveau siècle sans pour autant dénigrer ses gloires passées.
Le projet n’a pas pour fonction de soulever la question esthétique. Il relève simplement de la prouesse technique : pour le mener à bien, je ne dispose que d’une centaine d’ingénieurs et d’ouvriers ainsi que de seulement trois années ! Dans ces conditions, je dois élever un colosse de fer de 300 mètres. Il sera le bâtiment le plus haut que l’humanité ait jamais construit ! Ce projet grandiose nécessite une synthèse de la technique française moderne et lorsqu’il sera terminé, la France et Paris s’enorgueilliront de celui-ci. Le public invité verra l’édifice et ne doutera point du génie français.
Quant aux critiques des esthètes, des sculpteurs, des peintres et des écrivains, je suis bien aise de les recevoir. Si les artistes se piquent de critiquer les inventions techniques, qui jugera de la valeur esthétique des œuvres d’art ?
Gustave Eiffel
16 février 1887
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